Voilà une petite révolution, voire révélation, dans la fiction française. Jeudi soir, sera diffusé sur Arte une nouvelle série qui ne contient ni flic, ni sexe, ni violence, et devant laquelle on ne s’ennuie pourtant pas. Ainsi Soient-Ils est sans contexte un des évènements de cette rentrée série, et ce n’était pas gagné !
Choisir pour thème central la religion catholique est osé, casse-gueule même. Le danger de tomber dans la caricature est toujours présent, se contenter des clichés étant de toute évidence bien facile pour une religion sur laquelle on aime bien taper gentillement. Mais les créateurs de la série, Rodolphe Tissot, Vincent Poymiro, Bruno Nahon et David Elkaïm, n’ont pas l’ambition de nous dévoiler de grandes vérités sur l’Eglise : ici, il s’agit de faire sentir ce que peut être la foi, la pratique religieuse, et nous obliger à nous poser de nouvelles questions.
Ainsi, la série s’intéresse à cinq jeunes hommes qui décident de devenir prêtre car ils ont entendu l’appel du christ. Emmanuel (David Baiot), José (Samuel Jouy), Yann (Julien Bouanich), Guillaume (Clement Manuel) et Raphaël (Clément Roussier) entrent au séminaire des Capucins où le père Fromanger (étonnant Jean-Luc Bideau) leur servira de guide dans l’affirmation de leur foi. La force de la série est de faire passer un message de tolérance, surtout sur le fait que ces hommes dont la foi est vraie et touchante ne sont que des hommes, avec leurs faiblesses, leurs passions mais aussi leur lumière. Ces cinq garçons viennent de milieux très différents, certes archétypaux mais pas dans la mauvaise caricature. De plus, certaines intrigues sont certes mieux ficelées que d’autres, plus fortes et émouvantes également, mais le second épisode fait vraiment décoller l’histoire après un pilote un peu long qui met tous les pions en place.
Bien sûr, la série ne peut déjouer tous les pièges, et certaines visions sont un peu archaïques : les cardinaux toujours en soutanes, le pape buvant de la tisane, des séminaristes qui ne suivent aucun cours, une vision un peu borgiesque des guerres de pouvoir, et des séminaristes qui ont peut-être la foi mais qui semblent quand même bien tristes… Mais elle a le mérite de soulever de vrais problèmes, et de le faire simplement. Il y a une crise des vocations, une image rétrograde qui colle à l’Eglise Catholique qui est autant en crise financière que les pays européens.
Enfin, il ne faut pas oublier que la fiction demande de s’éloigner parfois de la réalité. La série risque de soulever l’éternel problème français qu’est l’éducation à l’image et à la fiction : ce n’est pas parce que c’est montrer comme ça dans de la fiction que c’est vrai. N’hésitez donc pas à regarder Ainsi soient-ils, sans avoir peur de « bondieuseuries » ni de vous heurter un peu à la réalité d’un métier autrement difficile. Une bonne série française, bien réalisée, asse bien écrite et plutôt bien jouée, ça ne se refuse pas!
« Ainsi soient-ils » : ni flic, ni sexe, ni violence ? …
et ces sourdes et obscures luttes pour le pouvoir, ses attributs, les égos, la domination, l’argent, le plaisir ! Enfin tout ce qui fait l’Histoire, et a forgé plus particulièrement la notre depuis 2000 ans !
D’abord le titre est bien pluriel et ce pluriel annonce la couleur : il ne s’agit pas de la volonté divine – et de son corollaire la foi des brebis – qu’annoncerait « Ainsi soit-il » (qu’il en soit ainsi ..) mais de la triviale vie des hommes qui fondent leurs pouvoirs, leurs relations, leurs rêves et leurs actes dans une foi qui leur donne raison… en toute charité fraternelle contre les autres.
Oh qu’il est vrai, qu’il sonne vrai de duplicité, d’âpreté et de méchanceté! et qu’il semble bien faible à coté de la réalité ce dialogue merveilleusement joué par Michel DUCHAUSSOY et Jean-Luc BIDAUD dans leur première joute !
Il s’agit bien du POUVOIR ! à l’état pur ! et de la toute puissance des hommes d’église ! Ainsi sont-ils !
Là est le principal ressort de cette série qui s’annonce effectivement délectable et tout à fait vraisemblable (semblable au vrai). Et qui a tous les attributs d’une série bien construite et réalisée, à l’égal des despérate housewifes ou de Borgen.
Et qui, foi d’enfant de choeur, n’est en rien une caricature !
Vivement la suite ce soir !
Deux petites remarques, au passage :
– la discussion et les commentaires du forum sur le site d’Arte, au bout du lien proposé, attestent d’une part qu’il s’agit bien de ça, d’autre part – bien qu’atténués – ces luttes sont toujours actuelles: les questions religieuses sont des faux-nez qui fonctionnent toujours aussi bien! ils sont prets à s’étriper dans la foi et l’amour !
– ces turpitudes du pouvoir ne sont pas spécifiques à l’Eglise et aux religions : d’autres séries en parlent tout autant, dans le monde politique ou la famille. Et pourraient en parler pour le monde des médias ou encore les mandarins de l’Université. Ce qui peut-être spécifique c’est que dans l’Eglise, au nom de la peur de la mort et du néant, elles ont tué et asservi pendant 20 siècles.