Chaque année, c’est la même rengaine. Tous les mois de mai que Dieu fait depuis 66 ans, les gens n’ont qu’un seul mot à la bouche : Cannes. Lorsque l’on travaille dans le milieu du cinéma, c’est encore pire : tout votre monde ne semble tourner qu’autour de la croisette. Chaque année, un de vos réalisateurs fétiches, l’une de vos stars favorites seront présents. Mais vous, vous restez chez vous. Parce qu’il faut bien travailler, parce que vous n’avez aucune raison d’y aller, le Festival de Cannes se vit pour la majorité des gens via des écrans et des articles de journaux. D’où un certain agacement, et une petite pointe de déprime : pourquoi pas moi? se demande-t-on devant la montée des marches…
Vous savez quoi ? Cette année, il y en a marre. C’est décidé, le festival, je le fais chez moi. D’abord, à Cannes, il ne fait même pas plus beau qu’à Paris, a en croire les comptes-rendus de la cérémonie d’ouverture… que je n’ai pas regardé parce que j’avais piscine (enfin, salsa, en l’occurrence). De plus, le Festival de Cannes semble bouder les gens comme moi, ce que je suis : les femmes et les scénaristes. Les femmes, car il n’y a qu’une réalisatrice en compétition officielle cette année (il y en a longtemps eu aucune), les scénaristes, car il est rare que ce corps de métier soit représenté dans le jury (il ne l’est pas du tout cette année.). C’est drôlement embêtant, vous ne trouvez pas ? Enfin, parce qu’il n’y a pas qu’à Cannes qu’on peut voir des films et célébrer le cinéma. Quelques-uns d’entre eux (comme Gatsby le Magnifique ou Le Passé) sortent sur les écrans en même temps qu’à Cannes, et les 24, 25 et 26 mai, sur les 20 films sélectionnés en compétition pour la palme d’or, quinze films seront projetés au cinéma Gaumont Opéra. Pour ceux qui le veulent vraiment, la sélection parallèle Un certain regard, soit 18 longs-métrages, est projetée du 29 mai au 4 juin, au cinéma Reflet Médicis, La Quinzaine des Réalisateurs du 30 mai au 9 juin au Forum des images et la Semaine de la Critique du 6 au 10 juin à la Cinémathèque. Oh, et j’oubliais : les stars, on les croise tous les jours dans les rue de Paris, et Spielberg je l’ai vu à l’avant-première de Tintin, hein !
Alors, quand on me demande en tout innocence : « bah alors, t’es pas à Cannes ? », au lieu d’osciller entre l’envie de hurler, d’être aigri ou de bouder, rien ne fonctionne mieux qu’un petit sourire énigmatique : Cannes, cette année, c’est à Paris !